Les internes en médecine, généralistes et spécialistes, sont appelés à la grève lundi 17 novembre pour protester contre le projet du gouvernement de réforme de leur temps de travail. L'Intersyndicat national des internes (ISNI, majoritaire), qui a déposé ce préavis de vingt-quatre heures il y a presque un mois, a menacé « d'autres mobilisations plus longues dans les semaines à venir ». A la mi-journée, un quart des internes étaient en grève, selon l'Intersyndicat.
La théorie : ce que dit la législation
Un interne est un étudiant ayant déjà effectué six années de médecine et dont le temps est divisé entre formation universitaire, pratique et théorique au sein d'un des 32 centres hospitaliers universitaires (CHU). On en compte actuellement plus de 19 000.
Son temps de travail est légalement divisé en 11 demi-journées :
- 9 pour des activités pratiques au sein de l'hôpital ;
- 2 pour des formations théoriques.
La réalité : des semaines à rallonge
Dans un avis rendu en mars, la Commission européenne a relevé le « non-respect par la France de plusieurs droits fondamentaux dans l'organisation du temps de travail des internes », notamment le fait que « la législation française ne [leur] garantit actuellement pas la limitation de la durée moyenne de travail hebdomadaire à 48 heures ».60 Selon une enquête nationale de l'ISNI réalisée en 2012, les internes français travaillent 60 heures en moyenne par semaine.
18 Ils ne peuvent suivre en moyenne que 18 demi-journées de formation théorique par semestre sur les 54 normalement obligatoires. Il en résulte que la moitié des internes s'inscrivent à une formation complémentaire pour pallier les manques de leurs études.
22 % En 2014, 22 % des internes déclaraient un non-respect du repos de sécurité, contre 21 % en 2012. Cette infraction à la législation est principalement à l'initiative du responsable de service (69 %) et constaté bien davantage en chirurgie (71 %) que dans les autres disciplines
15 % L'absence de repos de sécurité peut s'avérer dangereuse : selon l'étude de l'intersyndicale menée auprès des internes, « 15 % des internes déclarent avoir commis des erreurs médicales de prescription, de diagnostic ou d'acte opératoire en lendemain de garde » tandis que « plus de 39 % estiment qu'ils en ont probablement réalisé sans l'affirmer avec certitude ».
Les solutions du gouvernement... jugées insuffisantes
Après les critiques européennes, le ministère de la santé a travaillé sur un texte (rendu public en août par l'ISNI) réduisant à 10 le nombre de demi-journées de travail, dont 2 consacrées à la formation. Par ailleurs, le texte instaure une pause de quinze minutes entre ces demi-journées de travail et la comptabilisation des gardes d'astreinte dans le temps de travail.Insuffisant, selon l'ISNI, qui avait jugé ce projet de réforme « inapplicable » et « ne répond[ant] ni aux attentes des internes, ni aux mises en garde de la Commission européenne ». L'intersyndicat demande notamment que la demi-journée supprimée soit celle du samedi matin, pour borner la semaine de travail du lundi au vendredi – et pour que le samedi matin, lorsqu'il est travaillé, soit compté comme une garde et donc mieux rémunéré.
Le syndicat des internes en médecine générale (Isnar-IMG, minoritaire) avait en revanche salué les avancées concrètes du projet gouvernementales. « Les astreintes […] bénéficieront enfin d'un repos de sécurité, le temps de travail sera géré par les autorités administratives et l'interne disposera de recours, notamment auprès de l'ARS, en cas de non-respect de ces dispositions », avait estimé le syndicat.
Face à la grogne, la ministre de la santé, Marisol Touraine, a annoncé vendredi « la mise en place d'un dispositif de sanctions » à l'égard des établissements qui ne respectent pas le repos de sécurité des internes. Elles pourraient être « d'ordre financier » ou prendre la forme d'un retrait de l'agrément qui permet aux établissements d'accueillir des stagiaires. La ministre de la santé a également réitéré son engagement pour la réduction du temps de travail des internes, « notamment par la sanctuarisation des 2 demi-journées universitaires ».
Malgré ces déclarations, l'intersyndicat des internes a souhaité maintenir la grève du 17 novembre, réclamant toujours une semaine bornée du lundi au vendredi.
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