Une infirmière a développé une sclérose en plaques après un vaccin. Elle se heurte, depuis vingt ans, aux réticences de l’hôpital pour faire valoir ses droits.
Patricia Nervo, 49 ans, plaque sa main sur une impressionnante pile de dossiers. Dernier document qu'elle va chercher en claudiquant : un jugement du tribunal administratif de Nice qui vient de condamner son employeur, le CHU de Nice, à lui verser la somme de 32 178 euros. Cela correspond à quatre ans et demi d'arriérés de traitement.
Le tribunal ordonne également une nouvelle expertise médicale pour chiffrer le préjudice lié à sa sclérose en plaques, une maladie évolutive très invalidante.
« En 1991, en tant qu'infirmière, j'ai reçu en trois injections, une vaccination obligatoire contre l'hépatite B, raconte Patricia Nervo. Quelques semaines plus tard, j'ai commencé à souffrir d'un doigt, comme une écharde. Puis de deux, de trois et de la main entière. Je me suis retrouvée incapable de perfuser un patient. »
Les médecins tâtonnent, puis découvrent des tâches blanches sur le cerveau de l'infirmière. Le diagnostic tombe en 1992 : c'est une sclérose en plaques.
« À cause de ma maladie, j'ai dû ralentir et travailler à 80 % de 2008 à 2011. Or, j'aurais dû percevoir mon salaire dans son intégralité », explique l'infirmière.
Aujourd'hui, Patricia Nervo a cessé complètement son travail. Elle est hébergée dans le pavillon de ses parents. Elle souffre de troubles cognitifs, de l'équilibre, a perdu ses dents, s'est fracturée le pied, et subit un traitement à vie pour tenter d'espacer les poussées de la maladie. Des épisodes qui l'affaiblissent à chaque fois un peu plus.
« 8 000 euros, le prix de mon silence »
Aucune preuve scientifique n'a pu établir un lien formel entre la vaccination et le développement de cette maladie neurodégénérative. Mais Patricia Nervo, épaulée depuis plus de quatorze ans par Me Christophe Tora, a obtenu plusieurs décisions de justice, toutes en sa faveur.
« Un arrêt du Conseil d'État de 2007, a fixé les conditions dans lesquelles l'État pouvait être déclaré responsable des conséquences d'une sclérose en plaques après une vaccination. Il est dès lors regrettable qu'une partie de la communauté scientifique tente de minimiser les dommages résultant de cette vaccination et que le CHU refuse de prendre en charge sa salariée »,s'insurge l'avocat.
L'État a longtemps rechigné, puis a tenté de transiger.
« À l'origine, la commission de règlement amiable des accidents vaccinaux m'avait proposé 8 000 euros d'indemnisation. C'était le prix de mon silence. J'ai refusé », note, non sans fierté, l'infirmière.
L'infirmière avait obtenu une première réparation de 78 000 euros. L'État avait fait appel. La somme avait été portée à 100 000 euros par la cour administrative de Marseille.
L'infirmière a également fait reconnaître le caractère de la maladie « imputable au service».
Que de combats pour en arriver là ! Le ministère de la Santé estimait que seule la première poussée de la maladie était liée à la vaccination. Argument que le CHU ne cesse de reprendre au grand dam de sa salariée et son avocat : « Comment le CHU peut-il continuer d'affirmer que cette maladie était consolidée en février 1992, alors qu'il s'agit d'une maladie évolutive ?» s'interroge Me Tora.
Le tribunal administratif de Nice dans son dernier jugement, note que le CHU commet « à la fois une erreur de droit et une erreur manifeste d'appréciation » et l'enjoint de régulariser la situation administrative de Mme Nervo.
Une énième décision de justice révélatrice du combat incessant et épuisant que mène cette Niçoise à la fois contre la maladie et contre son administration.
http://www.nicematin.com/nice/malade-apres-un-vaccin-elle-se-bat-depuis-20-ans-contre-le-chu-de-nice.1838927.html
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