mercredi 25 janvier 2012

Pierre Dukan : « Le surpoids au bac ? Je maintiens ! »

Il est le pape des régimes. En 42 ans, le docteur Dukan est devenu l'homme qui fait maigrir tout le monde. Il a mis à la diète François Hollande, David Douillet et Jean-Marie Le Pen. Et le voilà qui met les pieds dans le plat de la politique. Dans sa Lettre ouverte au futur président de la République, le nutritionniste millionnaire propose cent vingt mesures pour que la France devienne la tête de pont planétaire de la lutte contre le surpoids. Saugrenu, discriminatoire, commercialement opportuniste : les qualificatifs fusent, notamment sur son projet de créer une option « régime » au bac. Mais il persiste et signe.
Votre Lettre ouverte au futur Président vous a valu une volée de bois vert. Vous l'aviez prévue ?
Non, ça non. Mais si on est assez bête en France pour ne pas prendre conscience du drame du surpoids, tant pis. Cela touchait 500 000 Français dans les années soixante ; plus de 22 millions aujourd'hui ! On n'en est pas encore à 72 % de la population comme aux USA, mais c'est préoccupant. Au lieu d'en prendre conscience, on m'a traîné dans la boue en ne retenant qu'une des 120 mesures que je préconise, celle de l'option surpoids au bac. Comme de bien entendu, personne n'avait lu mon livre… puisqu'il n'était pas sorti. Même le ministère de l'Education nationale s'est cru obligé de trouver saugrenue mon idée alors qu'il n'en connaissait ni les détails ni la philosophie.
Tout de même, une option régime au bac, ça ressemble à un mauvais gag discriminatoire…
Personne n'est choqué par les points supplémentaires que les lycéens décrochent au bac grâce aux options jazz, équitation, corse ou, que sais-je, breton, qui, il me semble, ne changeront pas leur vie. Et là, moi on me tombe dessus parce que je suggère en première et en terminale une option « poids d'équilibre ». Pas une option « régime ». Juste un engagement à faire attention à son poids. Donc à sa santé. Trois pesées par an, dans le respect de l'intimité de l'élève. Le lycéen dont l'indice de masse corporelle reste stable entre 18 et 25 (1) gagne des points optionnels. Tout comme ses camarades qui ont un petit problème de poids, s'ils s'engagent à perdre cent grammes par mois. Cent grammes, ce n'est rien, c'est juste un cap pédagogique qu'un adolescent se fixe, démontrant qu'il a pris conscience que c'est sa santé qui est en jeu.
Un coup dans l'eau, pourtant ?
On verra bien. J'ai envoyé mes propositions aux 13 candidats déclarés à la présidentielle. Je ne lâcherai pas l'affaire. Dès ce matin, j'ai sollicité un rendez-vous auprès du ministre de l'Education nationale pour que, s'il refuse ma proposition, il le fasse en connaissance de cause, pas juste sur la rumeur « Dukan veut mettre les lycéens au régime ». J'espère juste que les Anglais et les Américains ne nous donneront pas une bonne leçon. Ce qui pourrait être le cas, vu l'engouement que ma proposition a suscité outre-Manche et aux États-Unis, où le très sérieux Financial Times vient, il y a quelques jours, de consacrer une page à mon programme.
Dukan ministre de la Santé, c'est une option ?
Je ne brigue ni un poste de ministre de la Santé ni de secrétaire d'État au surpoids. En revanche, l'enjeu sanitaire et sociétal du surpoids est tel pour la France que je suis prêt à me mettre à la disposition du prochain président de la République, quel qu'il soit, pour que ce combat soit mené, malgré les entraves que les lobbies de l'agroalimentaire et de l'industrie pharmaceutique y mettent.
Vous êtes un peu le « Che Guevara du surpoids » ?
Non, je ne suis pas un révolutionnaire, juste un pragmatique. Que se passe-t-il aujourd'hui ? Jusqu'à nos 50 ans, l'industrie agroalimentaire s'emploie avec ses produits sur-sucrés, sur-huilés, etc., à faire de nous des gros. Le jour de notre cinquantième anniversaire, c'est l'industrie pharmaceutique qui prend le relais ; et se régale en vendant par millions des « blockbusters pharmaceutiques », contre le cholestérol, l'hypertension, et que sais-je encore, qui coûtent des fortunes à la collectivité. Moi, je dis qu'en luttant contre le surpoids, avec des régimes adaptés, avec une pédagogie de la nutrition, la Sécurité sociale réduit son déficit de 10 à 15 % d'un seul coup. Ça n'intéresse personne ?
Vous tapez sur le lobby agroalimentaire et, dans le même temps, vous allez vendre un hamburger Dukan à McDo…
Oui, et alors ? Mais comme vous le savez, McDo n'a pas retenu mon idée. Non pas qu'elle ait été trouvée absurde, mais parce que c'est trop tôt… commercialement. Mon « Mac Du », c'était juste un Big Mac sans ces buns en pain blanc qui provoquent un choc insulinique. J'avais juste suggéré de le remplacer par un pain au son d'avoine. J'ai remballé mon idée. En attendant, quand mes enfants vont au McDo, je continue de leur déconseiller fortement de manger ce pain blanc…
Votre Lettre ouverte, en vrai, elle penche à gauche ou à droite ?
Que les choses soient claires : je ne fais pas de politique. C'est vrai, François Hollande, qui était un peu « doudou » avant de faire mon régime, ne tarit pas d'éloge sur moi. L'autre jour, sur le salon du livre de Brives, on s'est croisé. On a bien ri. Il m'a dit : « Je vous fais une telle pub que je fais finir par vous réclamer des royalties. » Mais ça ne va pas plus loin. David Douillet, lui, est UMP. Il est aussi l'un des meilleurs ambassadeurs de mon régime. Tout comme Jean-Marie Le Pen d'ailleurs. Sauf que les six ou sept kilos qu'il avait perdus l'avaient tellement requinqué que j'ai eu peur qu'il se représente… à cause de moi !



1. L'indice de masse corporelle, ou IMC, est le résultat de la masse divisée par le carré de la taille. Entre 18 et 25, on considère qu'il s'agit de la corpulence idéale

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