Ce n’est pas le seul mal de tête féroce : la névralgie du Trijumeau et la névralgie d’Arnold sont également des céphalées épouvantables, des « douleurs intolérables, résume Bruno Kastler. À tel point que les gens se disent prêts à se jeter par la fenêtre ».
Le professeur, patron de la radiologie interventionnelle douleur et imagerie cardiaque au CHRU de Besançon, s’intéresse depuis longtemps au traitement de la douleur, en collaboration avec le CETD (Centre d’évaluation et de traitement de la douleur) et avec « une équipe formidable ». Ces dernières années, il a mis au point un traitement novateur « mini-invasif » qui permet de traiter des céphalées rebelles aux traitements classiques.
Tout a commencé avec la névralgie d’Arnold, il y a vingt ans. « À l’époque, pour traiter cette névralgie, on faisait des infiltrations à l’origine du nerf d’Arnold sous rayon X, explique le professeur. Mais c’était très peu précis. J’ai introduit le guidage scanner, beaucoup plus précis, au millimètre près. » Résultat : 33 % des patients répondaient au traitement (une combinaison d’anesthésiques locaux et de corticoïdes retard) avec une durée moyenne d’efficience de cinq mois, soit 150 jours sans douleurs.
À la fin des années quatre-vingt-dix, Bruno Kastler a encore modifié la façon de procéder : il a ajouté un deuxième site d’injection, là où le nerf fait une boucle. Une innovation qui a fait bondir le pourcentage de patients « répondants » : 75 % et la durée moyenne (douze mois).
Un geste facile pour des mains expertes
La dernière touche a été apportée il y a quatre ans en supprimant le premier site d’injection, le plus délicat puisque situé à proximité de l’artère vertébrale et du plexus veineux du rachis. Le geste, toujours technique, est devenu « aussi simple qu’une vaccination », pour le professeur de radiologie. Bref, un geste facile pour des mains expertes. Et efficace : 86 % de répondants et une moyenne de neuf mois.Il y a deux ans, nouvelle étape : « Le centre anti-douleur m’a demandé d’évaluer ce traitement sur les autres céphalées. On s’est aperçu qu’on avait 2/3 de répondants à trois mois pour l’algie vasculaire, 50 % de répondants à trois mois pour la névralgie du Trijumeau et 77 % de répondants à trois mois pour les migraines associées à ces céphalées ». Autant de patients d’ordinaire « bourrés » de médicaments et qui peuvent diminuer leur consommation médicamenteuse voire cesser d’en prendre pendant plusieurs mois.
Bruno Kastler, qui a procédé à plus de 400 infiltrations, exporte sa technique à l’international, aux États-Unis, au Vietnam, en Afrique, en Chine, en Autriche, en Allemagne et dans les autres régions de France.
Reste un écueil : « Depuis la fusion des hôpitaux Minjoz et Saint-Jacques, les créneaux horaires du scanner interventionnel dédiés au traitement de la douleur ont diminué de plus de 60 %. Les délais d’attente pour les patients ont été multipliés par trois ».
La solution existe, dit-il : le Schéma régional d’organisation de soins (Sros) prévoit « un scanner dédié interventionnel depuis quatre ans ». Son acquisition réglerait le problème des créneaux horaires.
En attendant, Bruno Kastler a d’autres idées. D’autres pistes. Il souhaite travailler sur les migraines seules. Et se lancer dans une autre « technique novatrice » : la cryothérapie, afin de refroidir les nerfs à très basse température « pour pouvoir prolonger la durée de traitement ». Et ça, dit-il, « on pourra le faire dès cet automne ».
http://www.estrepublicain.fr/edition-de-besancon/2015/06/08/besancon-a-la-pointe-contre-les-maux-de-tete